Madame PAQUIN

Cette Parisienne exquise a le don complet de la grâce féminine. Elle marche à travers la fièvre des affaires avec le sourire calme de ses grands yeux clairs, interrompu par la méditation qui prépare ses décisions. Mme Paquin, bien que distante, reçoit avec une affabilité charmante, ceux qu'elle estime.
Elle n'a pas la notion du temps, et cependant elle arrive à faire tout ce qu'elle doit dans sa journée; c'est là une énigme dont elle seule a la clef.
Un mot typique donne l'idée de ce défaut gracieux, qu'elle connaît fort bien, et dont ne se plaignent jamais ceux qui en profitent, - ses amis : elle dit parfois en parlant d'un visiteur qui s'est endormi dans le salon voisin: « Je ne l'ai pas fait trop attendre, il est venu à deux heures, je l'ai reçu à trois ! ... »
Si l'on pense que Mme Paquin s'occupe de ses créations avec assiduité, qu'elle a l'œil à tout le mouvement de la rue de la Paix (qu'elle soit dans sa séduisante propriété de Saint-Cloud, à Deauville ou à Nice), qu'elle a de nombreuses œuvres philanthropiques à patronner; des expositions comme celles de Bruxelles et de Turin à organiser, où domine son génie inventif; qu'elle paraît au théâtre, aux grandes générales, - on demeure stupéfait qu'elle sache conserver, au milieu de cette dépense d'activité, sa grâce calme et sa silhouette jeune et élégante, sous le couronnement neigeux de ses cheveux argentés qui rappellent les délicieux pastels poudrés de Fantin-La tour.